Description et discours descriptif
Décrire, c’est représenter, par le texte, l’image, les sons, la matière, fidèlement ou non, les traits d’un objet animé ou inanimé, d’une action, d’un décor, d’une situation, d’une pensée, d’une émotion, d’une idée.
Le discours descriptif est narratif lorsque la description participe à la compréhension des évènements de l’intrigue, sinon il est non narratif et ralentit le fil du récit.
Sur ce site, lorsqu’il produit du descriptif l’agent narrateur se mue en agent descripteur.
* Cet outil narratif (comparons-le à un marteau) utilisé dans certaines conditions (précision et force pour le marteau), permet d’obtenir certains résultats pratiques (planter un clou pour accrocher un tableau). Mais ce résultat est généralement au service d’une finalité plus significative (décorer, séduire un public, afficher des opinions, etc.) que nous appelons sur ce site fonction narrative.
Pacte d’adhésion
Pouvoir se projeter dans des possibilités imaginaires ou réelles.
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Expérience cognitive
Améliorer notre compréhension du monde et de nous-mêmes.
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Expérience émotionnelle
Eprouver et partager toutes sortes d’émotions.
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Points clés:
• Une description est un ensemble fini d’éléments descriptifs.
Elle fait l’inventaire des caractéristiques que l’agent descripteur estime être digne d’intérêt. Ces traits peuvent être présentés dans un ordre pertinent ou non. La quantité de ce qui est décrit, ainsi que la distance entre l’observateur×rice et l’objet de la description peuvent également être signifiantes.
Une description, émise par l’agent narrateur principal, ou un personnage, interrompt le fil du récit des actions et des évènements. Elle provoque un ralentissement (ou « expansion ») du récit.
• Un élément descriptif transmet une information ponctuelle, partielle, transitoire sans donner l’impression de suspendre la narration (ex. un adjectif, un “gros plan”, etc.)
Un simple adjectif dans une phrase transmet une information sur le substantif auquel il se rapporte. Toute image a potentiellement une valeur descriptive.
Exemple d’éléments descriptifs :
1. Ned Beaumont est un détective amateur et l’homme de main d’un homme d’affaires qui dirige une opération de jeu illicite dans une petite ville de l’est des États-Unis.
Ned Beaumont fixa sur les joueurs ses yeux bruns où la haine allumait un peu sombre. Il entreprit de se lever. Ce n’était pas facile. Son bras droit pendait, inutile.
2. Un écrivain allemand d’une cinquantaine d’années, en vacances à Venise, décide de rentrer chez lui, malgré ou à cause des émotions torrides qui le tourmentent à chaque fois qu’il voit un jeune éphèbe polonais…
Aschenbach eut de la peine à conserver la seule mine qui fût de circonstance. Une joie extravagante, une incroyable gaieté souleva sa poitrine et la secoua comme un spasme. L’employé se précipita…
• La représentation de traits d’entités concrètes (paysages, personnes, objets) peut évoquer des idées et des émotions liées aux personnages ou à l’agent narrateur
Associé à certains facteurs (sous texte, sincérité, surprise, etc.), un élément descriptif contribue à transmettre du sens et des émotions qui vont au-delà de la simple fonction informative ou illustrative. C’est par exemple un paysage qui reflète l’état d’esprit d’un personnage (agent narrateur ou non) ou tente de provoquer des réactions émotionnelles spécifiques chez l’agent récepteur (puissance d’évocation).
• Un point de tension descriptive révèle l’inhabituel, l’inattendu, l’inconnu, l’imprévisible
C’est l’incursion de la surprise dans le discours descriptif, provoqué par le contenu et/ou la forme.
Les courbes de vos lèvres récrivent l’Histoire !
• Description et élément descriptif : Questions de fond
1. A quoi ça sert?
Chaque description ou élément descriptif peut avoir une « dimension pragmatique », c’est-à-dire être spécifique à son·a locuteur·rice et à son contexte.
2. Jusqu’où porte-t-il son attention ?
L’agent descripteur doit décider quand s’arrêter de décrire, jusqu’où assouvir la curiosité de l’agent récepteur, et jusqu’à quand celui-ci est prêt à endurer l’interruption de la narration de l’intrigue (pacte d’adhésion).
3. Quel est son degré d’exactitude ?
Une description ou un élément descriptif peuvent être erronés, incohérents, mensongers, flous, etc. L’agent descripteur peut volontairement produire une description qui ne correspond pas à la réalité dans le but de provoquer la réflexion de l’agent récepteur.
• Les descriptions et les éléments descriptifs génèrent du sens dont le but ultime peut-être de :
– Convaincre l’agent récepteur de la réalité sensorielle et conceptuelle du(des) monde(s) en présence (pacte d’adhésion).
– Lui communiquer un savoir (expérience cognitive)
– Le·la connecter à la sensibilité et/ou aux opinions de l’agent descripteur en orientant son regard (pacte d’adhésion, expérience cognitive).
– L’émouvoir (plaisir esthétique) et/ou rassasier sa curiosité.
-Le·la convaincre des compétences de l’agent descripteur (pacte d’adhésion).
• La frontière entre le discours descriptif et le discours narratif est parfois perméable
Le passage d’un texte, d’une scène, d’une image (même pourvu de marqueurs narratifs comme « À cette époque… » dépourvu d’évènements perd progressivement sa « narrativité » et devient un élément descriptif, des descriptions de situations, d’actions, ou de tout autre objet animé ou non.
C’est notamment le cas d’une chronique qui, sous le couvert de rapporter « objectivement » ce qui s’est passé, se contente de dresser une liste de faits marquants.
Il faut donc considérer des « degrés » de narrativité. D’un côté de l’éventail Il y a des œuvres densément « évènementielles » (comédie, mélodrame, etc.), de l’autre celles où « pas grand-chose se passe » (évènements), ou ce qui est représenté n’est pas inscrit dans une ligne temporelle, ou celles qui sont dépourvues du point de vue d’un agent narrateur. Il y a débat entre ceux qui trouvent qu’une œuvre ne devrait pas pencher trop d’un côté ou de l’autre…
Une description est constituée d’une succession d’éléments descriptifs dans un ordre spécifique : du général au particulier, du proche au lointain, de bas en haut, du « thème titre » au « prédicat qualificatif », etc. ou d’étapes inscrites dans le temps de l’énoncé par le discours de l’agent narrateur.
La comparaison est un élément descriptif auquel on a appliqué le facteur cohésion.
L’illustratif est du descriptif dépourvu de rapport de causalité (absence de facteur cohésion), qui n’apporte aucune expérience cognitive ou émotionnelle inédite.
• Un personnage peut prendre la place de l’agent narrateur pour décrire ce qui doit l’être
Tout personnage peut, à un moment du récit, produire une description ou un élément descriptif. C’est un moyen pour mieux intégrer une description à la narration, la rendre plus « organique ».
L’objet décrit peut constituer une métaphore du sentiment d’un ou de plusieurs personnages (p. ex. : « le paysage état d’âme »)
• Dans l’absolu, toute narration est nativement descriptive, car chaque mot, chaque image apporte, à un degré plus ou moins élevé, des précisions sur ce qui est désigné
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