Andy Warhol mange un hamburger (Andy Warhol eating a Hamburger) de Jorgen Leth (1981)
En choisissant de « ralentir » son récit en augmentant la quantité d’information, l’agent narrateur peut provoquer une surprise (point de tension narrative-descriptive) qui incite à la réflexion.
Face à la caméra immobile, un protagoniste mange un hamburger. Cette action dure trois minutes. Elle est filmée en un seul plan fixe ininterrompu (« plan séquence »). Trois minutes de description pure.
Ce choix radical de description cinématographique (durée action = durée de la projection) provoque une surprise chez l’agent récepteur qui peut se poser les questions suivantes :
- Pourquoi une situation aussi banale mérite-t-elle autant d’attention ?
- Quelle intention se cache derrière le choix de l’absence de montage ?
- Quel sens derrière le hamburger ? Le ketchup ? La manière de manger du protagoniste ? le fait qu’il ne termine pas son sandwich ?
- L’ennui que la situation peut provoquer chez l’agent récepteur fait-il partie du « message » ? Etc.
Après une assez longue hésitation, le protagoniste décide que la meilleure chose à faire est de se présenter et de nous décrire, par les mots, ce que nous venons de voir…
Heu… Mon nom est Andy Warhol et… je viens juste de manger un… hamburger.
Cette mise en abyme (la description d’une description) ne pourrait-elle pas être une forme d’interrogation sur la fonction même de la description et l’évènement qu’elle produit quand elle a épuisé son sujet, quand tout est connu et que plus rien ne reste à découvrir ?
Le sens d’une œuvre narrative est aussi dans les choix de récit.